Après les élections européennes, Sébastien Chenu (RN) a proposé de supprimer les accords entre la France et l’Algérie. Ces accords, datant de 1968 et souvent révisés depuis, confèrent encore aux ressortissants algériens certains droits que de nombreux responsables politiques français de droite veulent remettre en cause.
Les médias algériens y voient une démarche politique. Juste après les élections européennes, le parti vainqueur, Marine Le Pen, a ciblé les accords entre la France et l’Algérie. « Ils n’ont aucune raison d’exister aujourd’hui », a déclaré Sébastien Chenu, porte-parole du RN, lors de son intervention télévisée sur BFMTV. Il a évoqué l’accord signé le 27 décembre 1968, qui réglemente la circulation, l’emploi et le séjour des ressortissants algériens en France. Chenu a suggéré que ces accords migratoires soient réévalués, voire annulés. « Nous allons redéfinir complètement ces accords pour qu’ils ne soient plus des exceptions aux lois sur les migrations, permettant à l’Algérie de reprendre certains de ses ressortissants. Nous mettrons cela sur la table immédiatement », a-t-il annoncé. Chenu a également critiqué le gouvernement pour ne pas avoir agi plus tôt sur cette question.
Ces accords ont été révisés à plusieurs reprises depuis 1968, modifiant les modalités de visa et accordant une plus grande liberté aux ressortissants algériens pour s’installer en France à des fins professionnelles sans avoir à prouver la viabilité de leur projet. Ils leur permettent également d’obtenir une carte de séjour de dix ans après un an de résidence (contre trois ans pour les autres étrangers extracommunautaires), ainsi qu’une carte de séjour pour les conjoints dès leur entrée en France avec un visa de court séjour, tout en la règle générale exige un visa de long séjour.
Le RN utilise l’Algérie pour élargir sa base électorale, selon Algérie 360. Les réactions dans la presse algérienne ne se sont pas fait attendre. « L’Algérie reste un sujet de discussion pertinent dans la politique française, notamment pour l’extrême droite. Sébastien Chenu et le Rassemblement national utilisent ce thème pour aborder des questions plus larges et affirmer leur position sur l’immigration », observe Algérie 360. Le média estime que les positions du RN, qui « ne sont pas nouveaux », s’inscrivent dans une « continuité rhétorique » visant à mobiliser sa base électorale et à attirer de nouveaux sympathisants. Le site Tout sur l’Algérie (TSA) prévient en revanche que l’éventualité d’une France dirigée par l’extrême droite est « loin d’être un événement anodin ». TSA s’est également demandé si la visite du président algérien Abdelmajid Tebboune à Paris serait maintenue en cas de victoire du Rassemblement national le 7 juillet.
L’Algérie est attachée au traité de 1968. La remise en cause de l’accord franco-algérien sur l’immigration de 1968 est en effet récurrente au sein de la droite française, qui lui reproche un traitement inégal envers les autres ressortissants.
Même l’ancien Premier ministre d’Emmanuel Macron, Edouard Philippe, en juin 2023 dans L’Express, plaidait pour la dénonciation du traité, pointant un net favoritisme à l’égard des immigrés algériens. Il l’a déclaré dans une interview intitulée « Edouard Philippe : immigration ‘forcée’, Algérie, délinquance… ‘Nous mourons de non-dits' ». En décembre dernier, le groupe LR à l’Assemblée nationale avait également tenté d’abroger le traité, critiquant un système qui serait « un droit quasi automatique à l’immigration ». Cependant, la partie algérienne n’est pas d’accord. Selon le chef de l’Etat algérien, le traité de 1968 « doit être respecté, au moins tant qu’il est en vigueur ». Il a fait valoir qu’il existe une situation unique pour l’Algérie, même par rapport aux autres pays du Maghreb. Il a suggéré en plaisantant que les Algériens devraient avoir des visas d’une durée de 132 ans, soit la durée de la colonisation française en Algérie. Ce serait un échange équitable, dit-il !
Par : Arsène de Bangweni