La nouvelle directive bancaire européenne, CRD VI, entrera en vigueur d’ici 2025 et rendra les lois de l’Union européenne plus strictes pour les banques d’autres pays, comme le Maroc. Cela pourrait avoir un impact direct sur les transferts d’argent effectués par les Marocains vivant en Europe vers le Maroc.
La directive CRD VI, adoptée cette année par l’Union européenne, suscite des inquiétudes auprès des autorités et des banques marocaines. Abdellatif Jouahri, le patron de la banque centrale du Maroc, Bank Al-Maghrib (BAM), a exprimé ses inquiétudes lors d’une conférence de presse le 24 septembre à l’issue d’un conseil de BAM. Cette législation, créée par le département de stabilité financière de la Commission européenne (FISMA), vise principalement à limiter les activités des banques britanniques après le Brexit.
Cependant, cela affecte également les banques d’autres pays tiers, notamment les banques marocaines possédant des succursales dans sept pays européens et des bureaux de représentation à travers le continent. Cela soulève des questions sur leur avenir sur le marché européen. La directive restreindra la commercialisation de divers services, ce qui aura un impact sur la diaspora marocaine et africaine en Europe. Les importations marocaines pourraient être affectées par ces changements. Les transferts d’argent des Marocains résidant à l’étranger profitent à la fois aux banques locales et à l’économie marocaine.
Les transferts devraient augmenter de 3% pour atteindre 121,8 milliards de dirhams (11,3 milliards d’euros) en 2025.
En 2023, le montant d’argent envoyé par les Marocains résidant à l’étranger à leurs familles restées au pays a atteint un niveau record de 115,3 milliards de dirhams (11 milliards d’euros), contre 110,8 milliards de dirhams (10,3 milliards d’euros) en 2022. Il s’agit d’une hausse de 4,1%, selon les données publiées en août par l’Office marocain des changes. Cette tendance s’est poursuivie en 2024, avec des transferts dépassant 68 milliards de dirhams (6,3 milliards d’euros) au cours des sept premiers mois de l’année, soit une hausse de 3,3% par rapport à la même période de l’année dernière, comme le rapporte le BAM. Le BAM a également indiqué le 24 septembre que ces transferts devraient augmenter de 3% pour atteindre 121,8 milliards de dirhams (11,3 milliards d’euros) en 2025.
La baisse des transferts financiers des Marocains résidant à l’étranger aura des impacts importants sur l’économie marocaine. Ces transferts jouent un rôle crucial en soutenant les importations, notamment dans les secteurs de l’alimentation et de la consommation. En réduisant les flux financiers entrants, de nombreuses familles qui dépendent de ces envois de fonds pour couvrir leurs besoins quotidiens et investir dans des projets locaux pourraient également être confrontées à des difficultés. Mobilisation stratégique des autorités marocaines Pour protéger les flux financiers des Marocains résidant à l’étranger face aux nouvelles directives européennes, les autorités marocaines, en collaboration avec les banques, ont lancé une mobilisation stratégique. Selon Abdellatif Jouahri, rapporté par Le 360, cette initiative implique des négociations approfondies avec plusieurs acteurs clés, dont la Commission européenne et son département FISMA, ainsi que les gouvernements de pays européens comme la France, l’Espagne, l’Italie, la Belgique, et les Pays-Bas.
Selon le gouverneur de Bank Al-Maghrib, la montée de l’extrême droite en Europe, pourrait aggraver la situation.
Cet effort collectif implique la participation active de la Banque centrale, ainsi que des ministères des Affaires étrangères et de l’Économie et des Finances, soulignant l’importance de la coopération interinstitutionnelle. L’objectif ultime, selon la même source, est de garantir que les transferts des Marocains résidant à l’étranger restent fluides et soutiennent l’économie marocaine, tout en atténuant les effets potentiels de la réglementation européenne sur les familles marocaines dépendantes de ces fonds.
Un nouveau cycle de négociations entre les autorités marocaines et les banques centrales européennes débutera en octobre et se poursuivra jusqu’à la fin de l’année en cours. Ce processus, selon le gouverneur de Bank Al-Maghrib, vise à obtenir des éclaircissements sur les interprétations nationales d’une directive communautaire qui sera transposée en droit national, qui pourraient varier d’un Etat membre à l’autre. Jouahri a également exprimé ses inquiétudes quant à la montée de l’extrême droite en Europe, qui pourrait aggraver la situation.
Par : Ali Habib Camara / Afrique Première Tv